J’écris inlassablement.
Il n’y a pas de véritable courage dans le fait d’écrire, le plus grand courage réside dans le fait de le faire quand même alors qu’il est si difficile d’être lue. De continuer d’écrire quand il est si douloureux d’échouer à être choisie. Pourtant j’écris, encore. J’écris inlassablement.
J’écris des choses parfois vêtues d’impudeur, des choses qui pourraient n’appartenir qu’à moi, des choses qui pourraient ne pas être données en pâture, qui pourraient se taire. Mais je crois que je le fais d’abord pour moi, pour savoir qui je suis, qui se cache derrière moi, pour que je me comprenne plutôt que pour être comprise. J’écris pour ramener à moi toutes les émotions volatiles, celles évanescentes qui s’effilochent, celles qui m’échappent souvent, celles que je ne peux saisir. J’écris pour ne pas les perdre définitivement.
Et puis j’écris aussi pour toutes les fois où je ne peux pas le faire. Toutes ces fois où je me perds. Où j’erre dans l’existence sans être celle qui vit, sans être capable de vivre. Toutes ces fois où la flamme me quitte, où le souffle me manque. Quand je ne défie plus rien. Quand tout est vide. Parti. Et qu’il ne reste que les lambeaux. Toute les fois où je m’éteins. Incapable de combattre. Quand je ne suis plus qu’une ombre et que j’avance lentement comme on traîne un sac lourd. Quand tout m’effleure mais que rien ne me touche plus. Toutes ces fois où l’envie s’en va. La vie s’en va. Quand, au fond de moi quelque chose me grignote et se repaît de tout : du sourire à l’espoir, de la force à la foi. Quand je ne suis plus qu’une coquille vide qui fait semblant d’être au monde.
Que pourrais-je bien écrire du néant ? Que pourrais-je bien partager d’émotions anémiées ? Il y a toutes ces fois où ma plume se tait. Asphyxiée. Alors j’attends de respirer. J’attends. Que la chose cesse de me dévorer. Que la chose finisse pas se calmer. Se lasser. Me laisser. S’en aller. Enfin je renais. Je reviens à la vie et je peux dire les émotions qui germent et qui bientôt fleurissent sur le papier.
Au fond j’écris, je crois, pour ne pas mourir de tous ces moments coquilles où je ne le peux pas.